Soudan : Le général Abdel Fattah AL-BURHANE, chef de l’armée et dirigeant de facto du Soudan, et Mohamed Hamdane DAGLO alias Hemeti, chef des paramilitaires des Forces de Soutien Rapide (FRS).

Soudan, d’un conflit au sommet de l’État à une lutte armée

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RUBRIQUE : CHRONIQUE DU MOIS

Thème : Soudan, d’un conflit au sommet de l’État à une lutte armée

Le contexte historique d’un pays longtemps instable

Depuis plus d’un demi-siècle, le Soudan est ravagé par des conflits armés : guerres civiles, affrontement entre Nord et Sud, mais aussi à l’Ouest, avec les conflits du Darfour. En 1983, la stabilité du Soudan est menacée lorsque le gouvernement de Gaafar Mohammed NIMEIRY impose la charia et divise le sud du pays en trois provinces administratives. Le vif mécontentement des sudistes entrainera une crise qui dégénérera en guerre civile.

Le premier conflit du Darfour (1987-1989) a lieu en raison des tensions ethniques entre les Fours et les Arabes. Dans cette guerre, le gouvernement central n’intervient presque pas. Le deuxième conflit eut lieu entre 1996 et 1998. Cette fois, ce sont les Masalits qui se soulèvent contre les empiètements des Arabes. Le troisième millénaire au Soudan est marqué par un autre confit. Il s’agit de la Guerre Civile de Darfour qui est un conflit armé qui touche depuis 2003 la région du Darfour, située dans l’ouest du Soudan. Ces origines sont anciennes et le conflit est présenté comme opposants les tribus « arabes » dont sont issus les Janjawid et les tribus « noires africaines » non-arabophones.

Ces conflits tuent de plusieurs manières et entrainent des conséquences nombreuses et diverses au Soudan : morts de civils et militaires, accroissement de la criminalité violente, propagation de maladies, situation socio-économique inquiétante et migrations massives.

Les origines d’une opposition au sommet de l’État

Depuis le 15 Avril 2023, des combats opposent les troupes du général Abdel Fattah AL-BURHANE, chef de l’armée et dirigeant de facto du Soudan, et Mohamed Hamdane DAGLO, chef des paramilitaires des Forces de Soutien Rapide (FRS). En 2021, les deux généraux ont pris le pouvoir en organisant un putsch, mais sont devenus rivaux depuis. Les FSR, créées en 2013, regroupent des milices d’anciens janjawids, des miliciens arabes recrutés par l’ex-dictateur Omar EL-BECHIR, déchu en 2019, pour combattre des minorités ethniques au Darfour. Longtemps latent et cantonné aux négociations sur les conditions d’intégration des FRS aux troupes régulières, pour finaliser un accord politique sur le retour des civils au pouvoir, le conflit entre les deux généraux s’est transformée en lutte armée.

Les zones de combats s’étendent à plusieurs quartiers de Khartoum, la capitale, peuplée de cinq millions d’habitants terrorisés par l’inquiétante situation : frappes aériennes, chars dans les rues, guérilla urbaine… De nombreux quartiers de la capitale sont cernés et le conflit s’étend à d’autres régions, notamment au Darfour, l’une des zones les plus pauvres en Afrique.

Les conséquences de ce conflit

Depuis plus d’une semaine, les deux camps assurent tenir un bon nombre de bâtiments stratégiques, dont l’aéroport. Selon l’Organisation Mondiale de la Sante (OMS), le bilan fait état de plus de 500 morts et plus de 3.550 blessés dans les combats. Depuis le début du conflit, entre 10.000 et 20.000 personnes ont trouvé refuse au Tchad. Ce pays voisin accueille déjà plus de 400.000 refugiés soudanais. Les violences ont mis « hors service 70% des hôpitaux en zone de combat, selon les syndicats de médecins, dans un pays où près du tiers de la population souffre de la faim.

Le conflit a mis en émoi toute la communauté internationale. Le Pape François a appelé au dialogue face à la situation. Plusieurs pays ont rappelé leurs ambassadeurs et ont entamé des « opérations d’évacuations rapides » de leurs ressortissants, notamment Paris, Washington, Italie et Arabie saoudite. 

Malgré, l’appel du Secrétaire Général des Nations Unies, António GUTERRES, qui a encouragé les belligérants au Soudan à respecter le cessez-le-feu de 72 heures négociés, les affrontements se poursuivent.

Regard géopolitique sur la crise soudanaise

Sur les risques de la propagation de ce conflit sur cette zone géographique très fébrile et sensible, Cameron HUDSON, analyste du Centre pour les Etudes Stratégiques et Internationale (CESI) à Washington, démontre ses inquiétudes. Selon lui, une issue militaire rapide semble improbable et que tous les ingrédients sont réunis pour un conflit prêt à s’installer dans la durée. Il affirme, ainsi, que « Le défis est que le conflit, par ce qu’il s’étend dans chaque coin du pays, touche la frontière avec la Tchad, la République centrafricaine, le Soudan du Sud et l’Ethiopie. C’est une énorme inquiétude ». Dans la même longueur d’analyse, le professeur de sciences politiques émirati élargie les risques de l’extension de cette crise et alerte en ces termes « Si le Soudan entre dans un tunnel sombre, tout le monde en paiera le prix ».

Sur le plan stratégique et géopolitique, cette crise ne restera pas sans conséquences avec la situation de la cartographie des relations internationales. Déjà, les deux généraux antagonistes tentent d’attirer d’autres protagonistes. Le groupe paramilitaire Wagner est soupçonné d’être présent au Soudan où il opère discrètement et exploite les mines d’or du pays. Par ailleurs, Egypte soutient l’armée régulière soudanaise tandis que les Emirats arabes unis encouragent les FSR. Aussi, les positions de la Lybie, de la Centrafrique et du Tchad sont à surveiller car pouvant jouer un rôle politique ou militaire décisive dans cette crise.

Sources :

  • m.20minutes.fr
  • www.afdb.org
  • www.monde-diplomatique.fr
  • perspective.usherbrooke.ca
  • asso-azmari.fr

MOUHAMED GOLOKO, LE DIAÏSTE,
Étudiant en Master I HIRIS
Chroniqueur Historien
Jeune Reporter Citoyen

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