Emploi des jeunes: L’éternel défi

« Tous ces jeunes dans la rue à ne rien faire, c’est de gros problèmes en perspective », résumait, en 2015, la Libérienne Antoinette Sayeh, à l’époque Directrice du Département Afrique du Fmi. Une prophétie que le Sénégal a amèrement expérimentée lors des récentes manifestations. En guise de réponse, le Président Macky Sall a annoncé un programme d’urgence de 350 milliards de FCfa pour l’emploi des jeunes sur la période 2021-2023. Analyse des enjeux dans ce dossier.

Le chômage et le sous-emploi des jeunes font partie des principaux défis de développement pour l’Afrique à la veille d’une transition démographique sans précédent. Depuis des années, les démographes alertent sur cette « bombe » à retardement. On estime en moyenne à 11 millions le nombre de jeunes entrant, chaque année, sur le marché de l’emploi en Afrique qui n’offre que trois millions d’emplois ; d’où un gap d’environ huit millions d’emplois par an. Au Sénégal, le défi est similaire : 300 000 demandeurs d’emploi arrivent, chaque année, sur le marché du travail alors que l’offre ne dépasse guère 100 000.

L’Afrique abritera 38 des 40 pays les plus jeunes au monde en 2050, l’âge moyen sur le continent s’établissant à moins de 25 ans. En 2017, environ 70 % des Africains avaient moins de 30 ans et la majorité de ces derniers étaient au chômage ou en sous-emploi. Compte tenu des récentes tendances démographiques, la pression pour créer de nouveaux emplois et régler la question du secteur informel, où se trouve la majorité des travailleurs « pauvres », ne fera qu’augmenter au cours des décennies à venir. « Le chômage et le sous-emploi créent donc des désillusions croissantes et des frustrations chez les jeunes dont certains ont recours à l’émigration clandestine ou y songent très sérieusement », observe Chams Diagne, fondateur du cabinet Talent2Africa spécialisé dans le recrutement de talents en Afrique. Dans un article intitulé « Obstacles à la création d’emplois décents et politiques de l’emploi en Afrique de l’Ouest » et publié en 2018 dans la revue « Afrique contemporaine », les économistes Ahmadou Aly Mbaye et Fatou Guèye pointent une « confluence de paradoxes » à la création d’emplois décents, notamment l’environnement hostile dans lequel baigne l’entreprise en Afrique.

Pour essayer d’apporter une réponse à cette problématique qui n’épargne aucun pays du continent, la Banque africaine de développement a adopté une Stratégie pour l’emploi des jeunes en Afrique (Seja) pour la période 2016-2025. Cette dernière vise à créer 25 millions d’emplois et à développer les compétences professionnelles et entrepreneuriales de 50 millions d’autres jeunes dans les 10 prochaines années.

De l’avis de M. Diagne, le Sénégal pourrait tout à fait s’inspirer de ce modèle pour engager les différents acteurs dans la mise en œuvre d’un nouveau plan pour la jeunesse. Cette approche intégrée et durable poserait les jalons d’une appropriation véritable et d’interventions axées sur les besoins réels. Cela soutiendrait également les efforts pour une mise en œuvre efficace afin d’avoir le plus grand impact possible en termes de création d’emplois de qualité pour les jeunes sénégalais.

Seydou KA

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