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Entretien : Le professeur Ousmane THIARÉ, recteur de l’UGB se désole de la reprise avortée des enseignements… Voici l’intégralité de l’entretien

Le Recteur, Président de l’Assemblée de l’Université se prononce sur la situation qui prévaut à l’UGB. Le Professeur Ousmane THIARE se désole de la reprise avortée des enseignements en présentiel le 1er Septembre en conformité avec le plan de reprise adopté par l’AU. Mais il tient à rassurer toute la communauté.

Entretien :

Quelle analyse faites-vous de la situation qui prévaut en ce moment à l’UGB avec la reprise avortée du 1er septembre ?

Recteur : Le refus des étudiants de l’UGB de rejoindre les amphis à la date du 1er septembre comme indiqué est une situation que toute la communauté déplore.
Cela d’autant que le planning de reprise proposé par les instances pédagogiques a nécessité une articulation harmonieuse afin de pouvoir tenir le délai imparti pour finir la présente année académique, à savoir du 1er septembre au 31 décembre 2020.

Pouvez-vous revenir sur les décisions fortes prises par l’Assemblée de l’Université pour définir les modalités de la reprise ?

Recteur : Vous me permettrez d’abord de revenir sur le processus qui a mené aux décisions qui ont été prises par l’Assemblée de l’université.
Dès le mois de mai, l’UGB a mis en place une commission sanitaire pour accompagner l’Université dans les décisions pour un correct déroulement des activités d’enseignement-apprentissage.
Dans une démarche inclusive, la commission, présidée par le Pr Ndeye Mery DIA BADIANE, une spécialiste des maladies infectieuses qui fait aussi partie du comité COVID-19 régional, comptait en son sein les représentants du Rectorat, du CROUS ainsi que de tous les syndicats (PER et de PATS) et des étudiants.
Ce qui faisait que ses délibérations, qui mettaient le focus sur la situation épidémiologique nationale, mais surtout locale (zone Nord) étaient largement partagées.
Ainsi, quand la reprise en présentiel a été actée, nous avons demandé à la Commission de nous dire la meilleure approche qui favorisera le bon déroulement des enseignements tout en préservant la santé de toutes les composantes de la communauté.
C’est au sortir de ses travaux que la Commission a proposé un Protocole sanitaire dont un de ses aspects est le retour graduel avec 4500 étudiants.
Ce chiffre a été arrêté par la Commission après avoir échangé avec le CROUS sur ses capacités d’accueil qui favoriseraient le respect de la distanciation physique.
Conformément au processus de prise de décision dans les universités, cette recommandation a été soumise aux instances délibérantes des UFR où siègent également les représentants des étudiants aux côtés des autres composantes (PER, PATS).
Toutes les instances ont validé la recommandation en l’accompagnant d’un calendrier de reprise ainsi que de la composition des différentes cohortes. Elles ont également suggéré de poursuivre l’enseignement à distance.
Il revenait ainsi à l’instance suprême de l’Université, à savoir l’Assemblée de l’Université, représentative également de toutes les composantes et du Ministère, de se prononcer sur les modalités de reprise à l’occasion de sa session du jeudi 13 août 2020.
L’Assemblée de l’Université, au terme de riches échanges, a entériné les décisions pédagogiques des UFR adossées sur les recommandations de la commission sanitaire.
Il me semble utile de rappeler que ledit protocole sanitaire a été validé par le M. le Gouverneur de la région de Saint-Louis, en sa qualité de Coordonnateur du Comité régional de lutte contre l’épidémie, en présence de l’équipe de la région médicale et des experts de l’OMS.
Pour accompagner cette reprise graduelle et dans le souci de garantir la bonne exécution du calendrier, l’Assemblée a préconisé les mesures suivantes :
• la mise en place d’une commission composée des Chefs des Services pédagogiques autour du Responsable de la CPU pour le suivi et la gestion des cohortes et des programmations ;
• la continuation de l’enseignement à distance pour accompagner le dispositif.
• la sollicitation du MESRI pour un accompagnement financier en vue de l’acquisition des équipements devant constituer le dispositif sanitaire (lave-mains, gel, masques, etc.) ;
• le désherbage ainsi que la désinfection périodique des salles de cours et espaces de travail ;
• la résolution de la question lancinante de l’assainissement sur lequel le Ministère travaille activement ;
• des salles de tri et de prise en charge sanitaire au niveau du CROUS et du Rectorat si des cas se confirment ;
• la fourniture correcte en eau potable du campus social et pédagogique.
Comme vous le constatez, la prise en charge de l’intérêt de l’étudiant demeure le fil conducteur de cette approche.

Les étudiants disent être ouverts au dialogue. Ils ont d’ailleurs proposé leur propre plan de reprise. En avez-vous eu connaissance et comment avez-vous accueilli leurs propositions ?

Recteur : Effectivement j’ai reçu le plan de reprise proposé par les étudiants. Mais, je voudrais préciser, à l’endroit de l’opinion nationale, que les questions pédagogiques relèvent des instances qui sont autonomes conformément au principe des franchises universitaires.
Dès que les instances se prononcent, la mesure devient exécutoire.
Cela, les étudiants, à qui il a été donné l’occasion de se prononcer sur cette question lors des séances des conseils comme évoqué ci-dessus, doivent le comprendre.
D’ailleurs, même moi Recteur, je ne puis moduler ces décisions, a fortiori les étudiants.
Je rappelle également que chaque directeur d’UFR de même que celui de l’IPSL, dans leur volonté de rassurer davantage les étudiants, a reçu son délégué pour expliciter la portée de cette mesure. Et là je veux souligner vraiment l’engagement de tout le corps enseignant et du PATS à se mobiliser dans cette situation exceptionnelle pour sauver notre année.

On vous a entendu dire que les délibérations de l’Assemblée de l’Université sont applicables à tous, même si les étudiants avaient exprimé leur désaccord par rapport au plan de reprise adopté. Cela veut-il dire que vous ne reviendrez pas sur la décision de faire reprendre les cours graduellement ?

Recteur : comme indiqué ci-dessus toute délibération de l’Assemblée est d’office exécutoire jusqu’à ce que la même instance prenne une décision contraire.
Sous ce rapport, la modalité de reprise demeure effectivement le graduel.
Il faut comprendre le mode de prise de décision de l’assemblée de l’Université. Il y a tout un processus inclusif (toutes les composantes sont présentes dans les instances) qui part des sections en passant par les conseils d’UFR pour aboutir à l’assemblée de l’université qui est l’instance suprême de prise de décisions, surtout si cela concerne des questions pédagogiques. Une fois maintenant que les décisions sont prises, le Recteur que je suis ne peut pas y revenir et est tenu de les mettre en œuvre. Maintenant, dans la mise en œuvre, si les UFR se rendent compte qu’il y a des réaménagements à faire, elles apprécieront la situation. C’est pour cela que je demande aux étudiants de reprendre les cours et de continuer à discuter dans le UFR sur les plans de reprise proposés et qui ne laissent aucun niveau en rade. Les collègues sont engagés à mettre tout en œuvre pour valider l’année académique en cours si la reprise se fait immédiatement et qu’on ne perde pas davantage de temps. Nous avons déjà perdu l’année 2018-2019 à cause des troubles que vous connaissez, par conséquent nous ne devons pas perdre 2019-2020 et pour cela que je puis vous garantir que PER et PATS sont motivés, je demande aux étudiants d’en faire de même, car il y va de leur avenir.

Beaucoup d’observateurs considèrent que si cette situation perdure l’UGB va perdre son statut d’université d’excellence. Est-ce votre sentiment ?

Recteur : Je pense que l’UGB conserve toujours son label d’excellence malgré les crises qui nous secouent de temps en temps. Il faut rappeler aussi quand même que la situation était devenue stable et que nous étions même très en avance sur le calendrier académique avant la pandémie. Nos étudiants sont bien formés, s’insèrent très bien sur le marché du travail et nous donnent beaucoup de satisfactions dans les concours nationaux. Mais une chose est sûre aussi, ces instabilités peuvent affecter négativement les performances de l’Université.

Peut-on en arriver à ce que vous demandiez à l’État de vous donner les moyens de faire reprendre les cours pour les étudiants qui le désirent, par la réquisition des forces de l’ordre par exemple ?

Recteur : Il faut comprendre que les conditions d’intervention des forces de l’ordre dans le campus pédagogique sont bien définies dans la loi n° 94-79 du 24 novembre 1994 relative aux franchises et aux libertés universitaires. Dans cette loi, il est dit que le Recteur doit recueillir l’avis de l’assemblée de l’université avant de demander l’intervention des forces de l’ordre. Si les circonstances le commandent, l’assemblée de l’université peut être convoquée en formation restreinte.
Il est aussi dit qu’en cas d’urgence, le Recteur peut demander l’intervention des forces de l’ordre sous réserve d’en informer sans délai l’assemblée de l’université.
Pour revenir à la question, il faut savoir que notre université vient de loin et tout le monde doit œuvrer pour que notre espace soit pacifié. Nous ne souhaitons pas du tout en arriver à ces extrémités, car l’université n’est pas une zone de non-droit et j’invite tous les acteurs à éviter toute forme de violence physique ou verbale envers les autres composantes.

Avec cette grève le planning risque d’être chamboulé ! Quelles alternatives vous pourrez proposer ?

Recteur : Déjà nous avons perdu déjà dix (10) jours de cours, ce qui est énorme en termes d’heures de cours perdues surtout dans ce contexte. Car, comme je l’ai souligné ci-dessus, les étudiants n’ont pas à s’inquiéter des plans de reprise proposés par les UFR parce que comme je vous l’ai dit s’il y a des réaménagements à faire, les UFR apprécieront en toute autonomie. Je peux même vous informer qu’il y a même des UFR qui proposent d’aller jusqu’en janvier ou février et tout cela est fait pour respecter les exigences du système et ainsi sauver l’année.
Cependant, l’année universitaire n’est pas extensible à souhait et tout le monde doit avoir le souci de ne pas perdre une autre année à l’UGB ou aller vers des sessions uniques.
Je dis cela parce qu’il arrivera un moment où les UFR seront obligées d’évaluer la situation pour se déterminer sur la faisabilité des deux sessions ou même sur la validité de l’année.
J’appelle encore nos chers étudiants à reprendre le chemin des amphis et salles de cours pour sauver notre année académique. Nous devons terminer cette année et ne pas porter préjudice aux nouveaux bacheliers que nous devons accueillir dans de bonnes conditions, comme les étudiants déjà sur place l’ont été.
Nous avons perdu il y a deux ans une année et, c’est compte tenu de tout ce cela et de la situation exceptionnelle de la COVID-19 que l’assemblée de l’Université a pris ces mesures pour sauver notre année académique qui, je le rappelle, était très avancée. Nous avons à la fois une urgence pédagogique et une urgence sanitaire.

Enfin, je voudrais rassurer tout le monde que si toute la communauté adhère à ces mesures, nous sauverons notre année académique 2019-2020.

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