Ma plume a décidé de reprendre du service pour éclairer la lanterne des Sénégalais, amoureux de la lecture et soucieux du bon fonctionnement des affaires de la cité ; et ceci après une longue période d’observation, de réflexion et de préparation de ma défense contre une supposée plainte ayant comme cible ma plume, car oui 400 ans après l’esclavage et 63 ans après les indépendances, la liberté d’expression n’a jamais été aussi près de l’extinction au Sénégal.
Ceci étant dit, nous avons récemment eu à notre disposition une enquête diligentée par l’OCCRP (Organized Crime and Corruption Reporting Project) concernant un marché nébuleux de 45 milliards conclu entre le gouvernement du Sénégal et un fugitif international nommé Petit Boubéen à la date du 1er janvier 2022.
La motivation de cet article, n’est rien d’autre que la sortie indécente et vicieuse du ministre porte-parole du Gouvernement Abdou Karim Fofana, à qui on a donné un DÉCRET INEXISTANT (2021-563 du 10 mai 2021) en lui chuchotant sûrement à l’oreille « va justifier ce scandale devant les Sénégalais, ce peuple qui n’est intéressé que par le débat sexuel, donc ce sera une mission assez facile, brandit l’affaire Adji Sarr et ils ne verront que de la poudre à pépin ».
Comme disait l’autre, après la pluie médiatique sur l’affaire « Adji Sarr -Sonko », retour sur les choses essentielles qui concernent tous les sénégalais, peu importe notre appartenance politique, car c’est de l’argent du contribuable public dont il s’agit.
Pour être Bref et concis, nous allons démontrer en quelques points, que ce marché est complètement à l’ouest de ce que notre président nous avait promis en matière de lutte contre la corruption, en l’occurrence, une gestion sobre et vertueuse de nos ressources financières.
1– Les eaux et forêts sous la tutelle du ministère de l’Environnement, ne sont pas concernées par le décret 2020-876 du 25 mars 2020 portant modification des marchés publics notamment en son article 3 qui prévoit le fait que seuls la police, la gendarmerie, l’armée et les sapeurs-pompiers sont habilités à acheter des matériels d’armement sans appel d’offres justifié par la mention SECRET-DÉFENSE. Retenez bien ce décret, car c’est celui-ci qui a été visé sur la première partie du contrat expliquant le pourquoi et la destination des matériaux. Dans la foulée, ils ont visé un autre décret 2022-22 du 7 janvier 2022 qui établit effectivement que les marchés SECRET-DÉFENSE ne peuvent pas passer par la voie normale des marchés publics sauf exigence mentionnée au niveau de l’article 76 du code des marchés publics. Vous allez me demander où est le problème ? Le problème en est que dans ce marché, ils n’ont visé (mentionné) que ces deux décrets, donc pourquoi leur communiqué à travers le ministre porte-parole du gouvernement fait état d’un décret INEXISTANT complètement étranger à ce marché en l’occurrence le décret 2021-563 du 10 mai 2021 pour justifier le fait qu’on puisse commander des armes pour les agents des eaux et forêts sous l’égide du SECRET-DÉFENSE ?
En bon patriote intellectuel, nous avons recherché partout ce décret, mais rien, nada aucune publication au journal officiel. La corruption est grave, mais créer un décret fictif comme arme dans une république respectable est encore plus grave, mais faire état d’un décret non promulgué au journal officiel reste hallucinant. La question à 10 000 $ est alors pourquoi ils n’ont pas mentionné ce décret lors de l’établissement de ce marché ?
Pour rappel le même modus operandi a été utilisé par le ministre de l’Intérieur militant de l’APR lors des élections législatives avec un faux arrêté ministériel, pour justifier la bourde de Mimi Touré sur le surplus de parrainage de la liste Benno Bokk Yakar
2– Le manque d’expertise en matière d’armement de la société à qui on a confié le marché. Nous commençons à être des habitués de leur modus operandi, car si on se souvient bien, c’est de la même façon qu’Alioune Sall avait opéré concernant le scandale pétrolier avec Franck Timis, un autre bandit. Il faut noter qu’en 2011, l’IGE sous la supervision de Nafi Ngom Keïta avait brandi son véto face à Karim Wade pour le même dossier et les mêmes motifs. En effet la société de monsieur Boubé a été créée quelque temps avant qu’on ne lui confie le marché grès à grès ce qui laisse même penser que la société a été mise en place sciemment pour ce marché nébuleux. Une première irrégularité sanctionnée par le code des marchés publics. La question à se poser dans ce cas de figure c’est : pourquoi acheter des armes à un tiers si l’État du Sénégal a des accords de défense avec notre bien-aimé la France ? Tenons-nous la raison du lynchage noté au niveau des médias français en l’encontre d’un aussi bon disciple ? Serait-elle frustrée de ne pas avoir touché sa part du butin ?
3- Le manque de débit estimatif, sans doute le point le plus étonnant de ce contrat.
En effet nous avons remarqué une quantité énorme d’objets en tout genre, mais aucun prix unitaire justificatif, par exemple : un Kalashnikov vaut tant de francs ou encore, un véhicule vaut tant de francs, etc. Mettre en place une pro forma et des colonnes lisibles, car du moment où il s’agit de l’argent du contribuable, ils auraient dû détailler clairement les prix, pour un contrôle ultérieur. Ceci aurait permis une meilleure lisibilité de la facture, mais comme la chose est fallacieuse on ne peut voir que du flou.
4– L’absence d’étude de ce marché au niveau de la DCMP, car oui, tout marché public du Sénégal doit faire l’objet d’un avis préalable au niveau de la Direction Centrale des Marchés Publics qui est l’organe chargé de vérifier les garanties, les rubriques quantités et qualités, les normes et les délais conformément au code des marchés publics. Je vous vois venir, mais sachez que l’article 76 du code des marchés publics, exige l’avis conforme de la DCMP, y compris les marchés estampillés SECRETS DÉFENSE, attention, c’est une obligation légale et motif, de résiliation du marché. D’où l’importance d’une édification immédiate de la DCM par rapport à ce marché.
La liste des vices de contrats en ce qui concerne ce marché est loin d’être limitative, mais pour ne pas allonger l’article je m’en limiterai à cela.
Néanmoins nous tenons à préciser que c’est écœurant de voir un régime aussi prompt à faire rapatrier des compatriotes sous accusation de terrorisme allant même jusqu’à saisir interpole pour ensuite fouler du pied les règlements de la CEDAO, en accueillant sur son territoire un bandit international (Petit Boubé) qui aurait dû être remis aux autorités nigérianes, car faisant l’objet d’un mandat d’arrêt international. Cette jeunesse, ma jeunesse a soif d’un changement radical pour un avenir non pas au fond de l’océan Atlantique, mais dans un Sénégal prospère où règne l’équité et l’égalité des chances.
Le Sénégal actuel est tout sauf une démocratie normale, un pays où des jeunes croupissent en prison pour des raisons bassement politiques, assaillies d’accusations de terrorisme risquant ainsi jusqu’à 20 ans derrière les barreaux parce qu’ils voulaient exercer un droit constitutionnel à la manifestation ? Pendant ce temps, des enquêtes épinglent les gens du sommet dans des affaires qui ressemblent à un film hollywoodien. Je conclus, en espérant que ces armes dont personne ne sait où ils sont ne servent pas à rajouter des âmes sur la liste des 17 de nos frères qui ont rejoint le ciel à jamais.
Amary Ba,
Juriste